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Les trésors de l'armada.

de Mr. Robert STENUIT.

Ed. rare Albin Mitchell. (7000 ex.)

PROLOGUE

La galéasse roula bord sur bord par-dessus une muraille d’écume soudain émergée de la nuit. <<Les brisants !>>
Le premier matelot relevé bondit en proue, trancha les bosses d’un coup de hache. L’ancre tomba. Trops tard.
Les hommes de quart qui tentaient de raidir voyaient une masse noire et blanche se jeter sur eux de flanc . Avec un craquement de fin de monde, la Girona s’éventrait sur le roc, répendait ses canons, ses coffres, ses entrailles, jetait aux vagues déferlantes mille trois cents hommes malades trops épuisés pour lutter.
Parmi eux : don Alonzo Martinez de Leiva, chevalier de Santiago et commandeur d’Alcuescar, le plus vaillant des capitaines, favori de Philippe II, commandant désigné de la Felicissima Armada, si Medina Sidonia venait à disparaître.
Parmi eux : soixante fils des familles les plus nobles de toutes les Espagnes confiés spécialement à don Alonzo, jaloux de ne servir que sous lui.
Parmi eux : un jeune hidalgo dont la dernière pensée, a la derière goulée d’eau salée, s’en alla vers l’Espagne. Avant de partir conquérir l’Angleterre, il avait passé, faut-il croire, avec sa fiancée, sa dernière nuit à terre. Au matin, son cheval déjà sellé, elle lui glissa au doigt en souvenir d’elle une bague tout exprès commandée au meilleur orfèvre. De gauche à droite, la houle à roulé son cadavre. Les crabes, les congres, ont dispersé sa chair. La bague a quitté son squelette, roulé dans une crevasse avec ses fonds de poche. Les tempêtes ont accumulé dessus le sable, les blocs de rocher, les carapaces de homard que la rouille des boulets s’oxydant, lentement cimentait.
Quatre siècles plus tard, dans la poussière des archives, j’ai reconstitué l’histoire. Sous dix mètres d’eau glacée, j’ai retrouvé le lieu du naufrage. Avec quatre équipiers, nous avons sondé chaque crevasse, cassé le dur béton, élingué les blocs, tamissé le sable. Tout au fond, avec un double écu d’or de Tolède et quelques pièces de huit, nous avons trouvé la bague offerte au chant de l’alouette par la fiancée aux yeux rougis.

Sur le bateau, la bague brille doucement au soleil d’Irlande. C’est le plus beau, le plus émouvant des trésors de l’Armada. Elle porte en chaton une petite main tenant un coeur offert et une boucle de ceinture dégraffée.

Gravés dans l’or, j’ai lu ces mots :

<< No tengo mas que dar te. >> . << Je n’ai rien de plus à te donner. >>


Source; Les Trésors de L'invincible Armada. Robert Stenuit. Ed. Albin Michel


Le Lien de la Page.

http://www.iro.umontreal.ca/~legua/rec/histoire.html
L'origine du scaphandre autonome par Mr. Stenuit (français) Long à charger.


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